Témoignage d’une victime.

Témoignage d’une victime. 

Par Jules Lamarre.

Le 8 septembre 2025, Priscilla Plamondon Lalancette et Michel Gaudreau, deux journalistes de Radio-Canada, ont publié sur Internet un article intitulé Un demi-million pour un climat toxique qui perdure à l’UQAC. Édith Mukakayumba y a vu l’occasion de relancer une affaire remontant à 2007, soit un cas de harcèlement flagrant à son endroit qui s’est déroulé à la même institution brisant sa vie et mettant fin à sa carrière, là où elle avait commencé à enseigner dès 1990. En 2007, elle était professeure invitée et sur le point d’obtenir sa permanence. Merci à ces journalistes d’avoir enfin ouvert une boîte de Pandore.

Nous avons affaire ici à un cas d’assassinat social. Après avoir été envoyée par-dessus bord à l’UQAC par un harceleur protégé par l’institution, Édith a dû faire en sorte de se relever et de tenter de rétablir sa réputation pendant que son harceleur pouvait la dénigrer librement dans son milieu de travail, le milieu de l’enseignement et de la recherche universitaire en géographie qui, au Québec, est un tout petit milieu où tout le monde se connaît. Le harceleur ayant bien fait son travail, jamais elle n’a pu se retrouver de travail en enseignement universitaire. 

Édith a d’abord tenté une contre-attaque juridique qui s’est soldé par un échec. Deux avocats consultés, dont un que l’on voyait fréquemment à la télé d’ici, nous ont dit qu’elle avait bel et bien une cause à faire valoir. Mais comme c’est un doyen qui, à la demande du harceleur, avait refusé de reconduire son contrat, elle ne pouvait poursuivre un doyen qui n’a de comptes à rendre à quiconque quand il prend des décisions dans l’exercice de ses fonctions. Elle devait alors s’en prendre à l’université, une institution assurée contre les poursuites judiciaires. Et là l’avocat connu de lui annoncer ce qui, selon toutes vraisemblances, risquait de se produire si elle décidait de poursuivre l’UQAC. Celle-ci engagerait les meilleurs avocats qui soient qui le traîneraient dans la boue jusqu’à ce que sa propre mère ne puisse plus la reconnaître avant de l’envoyer dans un caniveau, et cela en toute légalité. Et si jamais elle avait gain de cause, ce serait après de nombreuses années, une fois complètement ruinée et sa vie, finie. L’avocat lui avait dit que l’on assisterait ni plus ni moins qu’à une réédition du cas Robinson contre Cinar. Et comme Édith insistait, alors le célèbre avocat nous jetterait dehors de son bureau.  

Du côté politique et de celui des médias, aucun résultat non plus, des journalistes approchés ne voulant pas s’en prendre à l’UQAC. Quant aux politiciens rencontrés, Lisette Lapointe et Maka Kotto ne voyaient pas ce qu’ils pourraient faire pour la soutenir, les universités étant autonome face au gouvernement. Toutefois, Maka Kotto avait laissé une porte entrouverte. Si l’histoire d’Édith pouvait sortir dans les journaux, avait-il dit, alors il serait possible de poser des questions au ministre ou à la ministre de l’Éducation au cours de la période des questions à l’Assemblée nationale.

Or deux imprévus se sont produits. Il y a d’abord eu les deux journalistes de Radio-Canada précités qui ont réussi à percer le blindage de l’UQAC. Ensuite, nous venons tout juste d’apprendre que le harceleur d’Édith s’en est également pris durant dix ans ans à la professeure ayant été engagée pour remplacer Édith, une autre femme noire, lui rendant la vie impossible à l’UQAC.

Enfin, en 2018 le harceleur allait donc se faire prendre la main dans le sac. En effet, alors que les collègues de la nouvelle professeure voulaient qu’à ce moment-là elle accepte de diriger le département, celle-ci avait refusé en disant qu’elle aurait bien aimé accepter cette offre, mais qu’elle avait le harceleur d’Édith au cul depuis dix ans qui, si elle devenait directrice et pas lui, alors redoublerait de violence verbale à son égard. Les profs ont alors pris leur responsabilité et obtenu que l’administration impose au harceleur une sorte de « 810 », un mandat de paix lui interdisant de se retrouver en présence de la nouvelle directrice, de sorte qu’il ne puisse plus participer à la vie de son département. Le harceleur a ainsi pu être mis en situation d’échec et mat. Enfin, aimerais-je ajouter. 

Dans ces conditions, Édith peut à présent espérer obtenir justice sans risquer de devoir finir dans un caniveau à cause d’un harceleur. Il y a d’abord des journalistes qui s’intéressent à ce qui se passe à l’UQAC et nous savons que le harceleur a été dénoncé et puis mis en échec dans un autre cas de harcèlement. 

En conséquence, Édith a décidé de rendre public un enregistrement vidéo que nous avons préparé en 2021 qui peut à présent aller sur Youtube dans lequel elle raconte l’enfer qu’elle a vécu à cause de son harceleur de l’UQAC.  Et pour savoir qui est réellement Édith, je vous invite à lire un texte, Un assassinat social, que je suis en train d’écrire sur sa vie et dont je tirerai un livre. De plus nous comptons préparer plusieurs vidéos pour rendre son histoire disponible pour tout le monde.